Par Maurizio Imperiali
Ce qui arrive aux jouets du Casse-Noisette, qui vivent leur nuit, peut-il aussi arriver à d’autres choses plus humbles ?
Je crois que oui, et je crois que soustraire les objets à ce réseau de significations déjà donné, préexistant même au premier contact parce qu’imposé de l’extérieur, signifie en tirer un sens différent de leur usage-consommation. Puisque la consommation la plus radicale et définitive est manger, ici tout commence par quelques douceurs non mangées, des images comestibles, notre quotidien d’ingurgiter des images pour les réduire en atomes insensés. Une plus grande attention aux choses est aussi une plus grande attention aux hommes: soustraire les choses à la (quasi) inévitable consummation et les restituer à leur rôle de pure image-icône peut devenir un geste révolutionnaire… On pourrait partir de l’extrémité opposée de l’échelle, c’est-à-dire se transformer en cuisiniers de l’horreur, façonner en décorations de gâteaux les pires images qui défilent sous nos yeux. Et n’est-ce pas exactement ce qui se passe
lorsque l’enfant bosniaque est “servi”, entre deux plats, par le grand cuisinier télévisuel, prêt à devenir des atomes insensés ?

